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Cristal

taillé pour le vin

Miracle et mirage à la fois, le cristal évoque le mystère et la magie en fusion. Un matériau fascinant qui vit une histoire d’amour millénaire avec le vin. Car l’expression «Qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse» ne saurait convaincre les vrais connaisseurs qui savent comment exalter les qualités d’un cru en lui offrant le contenant idéal.

UN REVE D'ALCHIMISTE

Du sable et du feu… Comme celle du vin, la recette du verre est connue des hommes depuis la nuit des temps. Parmi les grandes étapes de cette histoire millénaire, l’invention de la technique du verre soufflé par les Phéniciens, qui permettra de créer des ustensiles et récipients. Plus tard, au Moyen-Âge, le verre coulé à plat ouvre la voie à la technique du vitrail, magnifiée dans les cathédrales, de Chartres à Notre-Dame de Paris. A la Renaissance, les verreries vénitiennes sont réputées pour leur verre clair «le cristallo» ancêtre de notre cristal et Venise garde sa supériorité pendant deux siècles. Le voyage continue en Bohême, aux confins de l’Allemagne et de la République Tchèque, où les maîtres verriers fabriquent un verre extrêmement fin et très facile à graver, aujourd’hui encore une référence.

CRISTAL MADE IN ENGLAND

L’invention du cristal est officiellement anglaise et date du XVIIe siècle. Les Britanniques en garderont jalousement le secret pendant plus d’un siècle. Comme souvent, le hasard fait bien les choses et nécessité fait loi. A l’époque, l’amirauté anglaise interdit d’utiliser le bois comme combustible pour le réserver à la construction de navires de guerre. Les verriers anglais alimentent leurs fours au charbon mais l’oxyde de carbone donne une vilaine couleur brune au verre. Ils ont alors l’idée d’ajouter de l’oxyde de plomb qui accélère la fusion. Merveille!
Ils obtiennent un verre à l’éclat remarquable et à la sonorité exceptionnelle. Ainsi, le cristal des cristalleries n’a rien à voir avec le cristal de roche, si ce n’est la brillance : le cristal désigne une qualité de verre soufflé particulière, contenant 24 à 40 % de plomb. Redécouvert en France vers 1781, le cristal fait briller les arts décoratifs grâce au talent des artisans d’art des grandes maisons de cristal, de Saint-Louis à Baccarat, de Sèvres à Daum. Sublimé par la taille et la dorure, le cristal joue sur les formes et les couleurs pour séduire les amateurs, subjugués par tant de somptueuse délicatesse.

… MATIERE A DISCUSSION!

Si le cristal a le chic pour sublimer le vin, la forme du verre joue elle aussi un rôle majeur. Certains fabricants se sont concentrés sur le lien entre la forme du contenant et le rendu gustatif du contenu. C’est le cas de la Maison Riedel et aussi de la Cristallerie Royale de Champagne. Selon ce principe, chaque type de vin mérite un design de verre particulier capable de mettre en valeur ses spécificités : fruité, acidité, composants minéraux, tanins, alcool. Pas question de sacrifier la fonction à l’esthétique. Bourgogne, Bordeaux jeune ou vieux, chianti, brunello, barolo… Selon les spécialistes, le même vin peut donc offrir une expérience organoleptique différente en fonction du verre de service. Question de physique et de chimie…

 

Par Anne-Marie Clerc

Photos: ©Cristallerie Royale de Champagne

Chateau-Baccarat

©Château Baccarat

DU VIN AU VERRE, LES REGLES DU JEU

Rappelons d’abord que le pied sert à tenir le verre sans affecter la température du vin et permet aussi de faire tourner le verre pour laisser le bouquet s’ouvrir. Sur la forme du verre, plusieurs critères doivent être pris en compte, tellement subtils qu’ils font l’objet de masterclass. Mais voici quelques bases :

La quantité d’air présente dans le ballon permet d’aérer le vin et donc de libérer ses arômes. Ainsi, les vins blancs aux arômes fragiles sujets à évaporation rapide nécessitent un verre de dimension plus réduite.

L’ouverture du verre influence directement la position de la tête du buveur et donc le premier contact du vin sur la langue. Une ouverture large fait baisser la tête, le breuvage arrive donc sur le bout de la langue, ce qui accentue la perception du sucre et de l’alcool. A l’inverse, une ouverture étroite qui force à pencher la tête en arrière favorise un premier contact avec l’arrière de la bouche, zone de plus grande perception de l’acidité.

Le bord du verre a aussi une influence selon qu’il soit net ou en bourrelet arrondi, qui souligne l’acidité ou l’astringence.

Une forme légèrement conique vers le haut empêchera les projections et concentrera les arômes.

Entre contenant et contenu, l’art du cristal relève aujourd’hui encore les défis du goût et continue de se réinventer…

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