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Liberté d’expression chérie…

Esprits libres par définition, les artistes ont toujours eu l’audace d’affirmer leur vision du monde, même si elle devait choquer leurs contemporains. Au XIXe siècle, Manet fait scandale en peignant Olympia, une femme du peuple, nue en plus… Et que dire de L’Origine du Monde de Gustave Courbet ? Le mouvement s’est accéléré au XXe siècle, où la transgression devient presque une raison de créer et où l’art envahit peu à peu toutes les sphères de la société. Les Fauves, Picasso, les dadaïstes qui fêtent leur centenaire cette année, Duchamp et sa Fontaine, Andy Warhol et ses boîtes de soupe, Yoko Ono et ses performances expérimentales, le Velvet Underground, La Nouvelle Vague au cinéma, le Nouveau Roman en littérature… Jusqu’à la fin des années 70, il faut oser toujours plus loin pour montrer sa créativité, explorer des voies alternatives, jamais empruntées. Et après ?

 

Trop d’audace tue l’audace ?

«Entre ce qui a déjà été fait et ce qui est interdit, les artistes n’osent plus grand-chose» selon Yves Michaud, philosophe. En 2003, le penseur de l’art estime que l’œuvre d’art n’existe plus mais que la beauté est partout. Devenu marchandise, l’art s’est normalisé et la subversion audacieuse, comme anticipation de l’évolution de la société devient rare. Même si la provocation est toujours là: Wim Delvoye ouvre le nouveau millénaire avec Cloaca en 2000, Jeff Koons fait scandale à Versailles, Maurizio Cattelan avec Hitler prie, Andres Serrano avec Piss Christ… Pour aller plus loin, il faudrait braver les lois et s’aventurer en territoire interdit… Ainsi l’installation vivante Le Théâtre du Monde de Huang Yong Ping prévue au Centre Georges Pompidou à Paris en 1994. Il s’agissait de laisser des insectes s’entretuer et les associations de protection de la nature sont intervenues.

Activistes de l’art

Aujourd’hui, l’audace artistique résiste tout particulièrement dans les pays où la liberté d’expression est malmenée et s’apparente alors à une dissidence politique. L’artiste chinois Ai Weiwei est l’incarnation exemplaire de l’artiste contemporain audacieux, qui mixe dessin, photographie, sculpture, installations et nouvelles technologies. Ce parti-pris de décloisonnement provocateur, ses prises de parole sur internet et ses œuvres militantes lui valent de sérieux ennuis avec la justice chinoise. Selon Yves Michaud, l’audace artistique contemporaine est souvent clandestine. Sinon, elle consiste à changer de forme, à croiser les disciplines et remettre en cause les territoires établis. Comme l’avaient fait les néo-dadaïstes des années 50, en mêlant chorégraphie, multimédia, musique, arts plastique.

AI WEIWEI: NEVER SORRY (US trailer) from Alison Klayman on Vimeo.