A Michel Reybier Hospitality edition

Par mots-clés

Par numéro de parution

- Mode -

Maurizio Galante

Réveiller l'émotion

Membre permanent de la Chambre Syndicale de la Haute Couture depuis 2008, Maurizio Galante est aussi créateur de costumes de théâtre, de sculptures, de scénographies, d’objets de design… Artiste avant tout, il multiplie les supports d’expression au gré de ses inspirations. 

Vous êtes incroyablement éclectique. Comment vous définissez-vous ? Et quel fil invisible sous-tend votre démarche artistique ? 

Il m’est impossible de rester dans une « boîte » ! J’aborde tous mes domaines de création en tant qu’artiste designer. Même les vêtements, je les conçois comme des sculptures souples que le corps va habiter, comme des maisons qui ouvrent leurs portes pour protéger et habiller. Et bien sûr, toutes mes réalisations sont interconnectées. Chaque discipline que j’explore se nourrit des autres et l’émotion en est le fil conducteur. L’émotion qui est en moi et que j’exprime, l’émotion de la personne qui reçoit mon travail.

La mode est-elle votre première passion ? 

J’ai commencé par étudier l’architecture à l’Université de Rome, en même temps que je fréquentais l’Accademia Costume & Moda. Si je ne suis pas allé au bout de mon cursus d’architecte, c’est que j’étais un jeune homme impatient ! Je trouvais qu’il s’écoulait trop de temps entre l’idée et la réalisation architecturale. Alors que la mode me permettait d’exprimer ma vision immédiatement, et même de la porter sur moi, ce qui me plaisait beaucoup.

Quels thèmes et inspirations nourrissent vos recherches artistiques ?

Je suis fasciné par la répétition des éléments, que je juxtapose par une technique de stratification. Cela crée de la richesse, un peu comme une musique tribale devient hypnotique avec deux notes. J’aime aussi faire naître l’équilibre depuis les opposés : créer une forme simple à partir d’une matière complexe, ou l’inverse. La collection des « oiseaux brodés » exprime exactement cela. Elle m’est très chère car inspirée des oiseaux de porcelaine de ma grand-mère. Enfant je les trouvais trop froids, trop lisses. Mes oiseaux, je les ai recouverts de plumes en organza de soie et de perles brodées. Ils dégagent de la force alors qu’ils sont fragiles. L’un d’eux est aujourd’hui à l’Élysée et fait partie de la collection du Mobilier National. Le mouvement aussi est une chose qui m’obsède, surtout pour les vêtements qui doivent bouger avec le corps, accompagner le geste, prendre vie avec la personne qui les porte.

Il semble que l’artisanat ait une place très importante dans votre travail ? 

Absolument, c’est l’âme d’un peuple ! Il raconte son ancrage, sa culture, son histoire. Les techniques utilisées en France pour le bois, le textile ou les métaux ne sont pas les mêmes que celles que l’on pratique en Italie ou au Japon. J’aime mixer une tradition artisanale avec une vision de demain pour inventer un objet d’aujourd’hui. Toujours cette idée d’équilibre…

Vous avez exposé à la Fondation Cartier, au Centre Pompidou, au Grand Palais, au Musée des Arts Décoratifs, au Louvre, au Musée de la Mode de Kyoto, au MOMA à New York et dans tant de lieux incontournables. Y a-t-il une expérience qui vous a particulièrement marqué ?

Nous nous intéressons surtout aux projets que nous sommes en train de vivre, à l’image de cette grande sculpture murale en métal, décorée par des techniques ancestrales et exposée au MOMA à New York. Je dis « nous » car depuis 2003, je travaille à quatre mains avec Tal Lancman dans le cadre de la société Interware que nous avons créée ensemble. Nous démarrons également une collaboration avec le Ministère de la Culture d’Arabie Saoudite et des associations de femmes artisanes, pour créer des objets à partir de techniques anciennes comme le tissage de palmiers. Ce projet contribue à l’autonomie économique de ces femmes et nous tient particulièrement à cœur.

En 2014, vous avez été nommé Chevalier de l’Ordre National des Arts et des Lettres. Qu’est-ce que cela a changé pour vous ?

C’est le regard des autres sur moi qui a changé. Et j’ai été très heureux de recevoir cette distinction des mains d’Aurélie Filippetti, alors Ministre de la Culture. C’est une femme qui comprend l’art et qui a une vision.

Vous venez de vous installer dans le Maine-et-Loire. Que réserve cette aventure ? 

Grâce à internet, nous avons la possibilité de vivre dans un village exceptionnel, auprès d’une abbaye du XIe siècle, où nous goûtons au bonheur de travailler librement, sur de formidables projets. Les merveilleuses vibrations du site invitent à la concentration et nous remplissent d’énergie. Dans un bâtiment très ancien, habité par une histoire puissante, nous sommes en train de créer un lieu pour partager notre travail et accueillir des étudiants, car nous avons la passion de transmettre.

Votre définition de l’art ?

Pour moi tout est art ! Il y a de l’art dans la vie, dans les gestes, dans les mots… L’art est le lien entre tous. Il est le signe que l’on est connecté aux autres. L’art, je le vis à chaque instant.


Propos recueillis par Michèle Wouters
Photo © A. Primavera

 

Red Drago bolero jacket
© Interware

Embroidered Birds
© J.M. Voge

Haute Couture Maurizio Galante
© Interware

Haute Couture Maurizio Galante
© J.L. Coulombel

MONSTER! : Exposition . Musée de la céramique Montelupo, Florence Vases et plats brodés représentés par la galerie Lefebre & Fils Paris En collaboration avec Sergio Pilastri
© M. Lensi

Haute Couture Maurizio Galante
© Interware

Share on FacebookShare on Google+Tweet about this on TwitterShare on LinkedIn
«
»

Articles connexes


Pour les amoureux des cimes

Mont Cervin Palace – Zermatt

Écrin au charme de la belle époque

Hotel Monte Rosa – Zermatt

Joyeux quinqua

Crans Ambassador – Crans-Montana

Cocooning au sommet

Schweizerhof Zermatt


Retrouvez-nous