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- Interview -

La Fondation Cartier pour l’art contemporain

UN PARI GAGNANT

Nous sommes à Paris, boulevard Raspail, dans un cube en verre de 1200 m2 imaginé par Jean Nouvel. Dans ce cadre tout en transparence et en reflets, prennent vie des expositions, des créations et des rencontres. Près de 35 personnes y travaillent. Dans un bureau entièrement vitré, nous rencontrons Hervé Chandès, Directeur de la Fondation Cartier pour l’art contemporain.

Pour la capitale française, cette vitrine dédiée à l’art contemporain est un atout de taille. Pourtant, le succès n’était pas garanti au départ. Depuis 1984, la Fondation Cartier invite le public à s’immerger dans des univers très variés. Chaque année, environ 250 000 personnes font le déplacement et pour chaque exposition, la mission d’Hervé Chandès est loin d’être facile mais néanmoins passionnante. Cette folle aventure dure depuis 24 ans pour ce découvreur de talents hors-pair, tout autant fasciné par les animaux que par Patti Smith.

Comment est née l’idée de créer cette Fondation ?
Au milieu des années 80, César avait parlé à Alain Dominique Perrin (alors Président de Cartier International) d’un projet qui lui tenait à cœur, celui d’ouvrir un lieu dédié à la création. Il voulait un endroit qui réponde aux besoins des artistes, pour travailler et exposer. C’était un artiste qui parlait pour tous les artistes. L’idée à l’époque était complètement novatrice.

Quelle identité avez-vous réussi à donner à la Fondation ?
C’est un lieu très particulier et personnellement je n’en connais pas de comparable. Tout d’abord, la Fondation montre des artistes connus ou pas. La programmation est internationale, s’adresse à tous les publics et les thèmes sont variés : design, mode, musique, spectacles vivants, sciences, anthropologie ou encore nature. Notre curiosité à 360 degrés est sans limite. En outre, c’est un parfait exemple de mécénat d’entreprise.

C’est cette programmation éclectique qui vous permet d’entretenir cette image de lieu phare de la création artistique ?
Je pense qu’il y a la constance. La Fondation existe depuis 34 ans, c’est miraculeux et extraordinaire pour un lieu privé. Près de 200 expositions ont été proposées. C’est du travail mais à chaque fois, on s’engage à 100 % dans une nouvelle aventure. C’est comme si nous apprenions une nouvelle langue. Nous avons pour vocation de créer du contenu, de la substance et ça fonctionne !

Pour la programmation, quels sont vos critères de sélection ?
Il y a beaucoup de paramètres. L’offre à Paris et dans le monde étant considérable, nous devons proposer autre chose. Les règles ne doivent pas devenir des limites. L’objectif étant que l’exposition soit un moment important pour le public. Si nous lui montrons ce qu’il a déjà vu ou ce qu’il pourrait voir à côté, la Fondation n’a pas de raison d’être.

D’une certaine manière, vous prenez beaucoup de risques ?
Complètement et tout le temps mais j’adore ça ! Le chemin n’est jamais tracé. Quand nous exposons David Lynch, nous montrons la facette de l’homme peintre et photographe que l’on ne connaît pas. Pareil pour Patti Smith ou Jean-Paul Gaultier.

Parmi toutes vos rencontres, quel est l’artiste qui vous a le plus marqué ?
Il y en a tellement ! Jean-Paul Gaultier par exemple. Lors de notre première rencontre, il m’a dit ne pas être intéressé à faire une exposition mais je l’ai invité à revenir me voir s’il avait une idée. C’est ce qu’il a fait et il m’a raconté son rêve d’enfant. Il voulait être boulanger et souhaitait transformer la Fondation en une boulangerie en réalisant des collections avec de la pâte à pain. J’ai trouvé ce projet formidable. Il ne croyait pas qu’on inviterait les visiteurs à manger ses créations mais on
a réussi !

Observez-vous un intérêt grandissant de l’art et est-il devenu plus populaire au fil du temps ?
C’est certain et c’est même devenu un peu excessif ! Il suffit de recenser les lieux d’exposition, rien qu’à Paris. Entre les musées, les fondations existantes ou futures, sans compter les galeries, il y a clairement un engouement général pour la culture. La création est partout et pour tous. Il y a une sorte de démocratisation générale de l’art.

L’espace d’exposition de 1200 m2 est-il suffisant ou envisagez-vous que l’institution s’agrandisse un jour ?
Aujourd’hui, quand on va voir une exposition, on aime s’asseoir, boire un verre, déjeuner avec des amis, or notre espace d’accueil a trouvé ses limites. Nous aimerions également exposer notre collection permanente et montrer le travail des cinéastes avec lesquels nous collaborons mais nous n’avons pas de salle de projection. S’agrandir ou disposer d’un second lieu est donc envisagé mais rien n’est encore décidé.

Fondation Cartier pour l’art contemporain - 61 boulevard Raspail - 75014 Paris - www.fondationcartier.com

Propos recueillis par Anouk Julien-Blanco

Images

© L. Boegly

© L. Boegly

Photograph of Lecture Hall in the Park construction process.
© Junya.ishigami+associates

Photograph of Home for the Elderly physical model.
© Junya.ishigami+associates

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